Parfois quelque chose nous renverse, sans heurt, et même sans vertige. Disons sans violence. Et même sans fatigue. C’est juste que le derrière de la tête devient beaucoup plus lourd et doit s’abandonner dans le profond des coussins, comme on s’ancre. Ainsi horizontalisés, les yeux ne voient plus, reflètent seulement, nuages ou néons du plafond, c’est selon, c’est égal.

On a exactement la même tête que d’habitude, sauf qu’on n’y est plus. On flotte un peu partout autour. Et encore, flotter, c’est beaucoup trop de stabilité encore, pour dire comme les pensées sont fluides, liquides, dégelées enfin de leur forme – débitée en cubes – des jours où la tête est droite et le cou raide.

Car oui, ça chahute, il y a du remous, la ligne de flottaison n’est pas stable. De temps à autre le néon radieux se voile d’un souci traversant. L’instant d’après c’est beau fixe depuis l’éternité, et c’est bien parce qu’on sait enfin dans ces moments là, que rien ne dure.

 

Songer | 2014 | la tête que ça nous fait