Les événements, passés futurs ou fantasmés, et comment nous au présent on louvoie entre, comment on croit pouvoir échapper à leur attraction – des phares braqués coupant notre trajectoire, des faisceaux à rejoindre pour s’y éblouir, s’y abîmer. Comment au présent on s’y cogne.
Les événements, on ne sait pas les qualifier, on aurait souhaité pouvoir les minimiser, mais nous restons devant, sidérés, nous les fixons, les nimbons d’une aura : autour, quelque chose irradie, qui nous altère.
Les événements : ce qui nous est désigné comme ce que nous avons à subir. Ce qui signale notre impuissance à penser notre vie, notre vie de personne et notre vie ensemble, autrement que comme répétitions de catastrophes.
Faut-il absolument que quelque chose nous arrive? Faut-il vraiment que nous égrenions notre temps en une série de traumatismes et entre, rien, le grand blanc, l’insignifiance, et la peur permanente que l’ennui cesse pour pire?
Nous lisons notre monde, nous croyons le lire, nous l’ânonnons, à la lumière des événements. Alors éteignons la lumière. Concentrons-nous sur ce qui dans l’ombre vit, habite à bas bruit. Fabriquons-nous un regard radicalement étranger, qui ne connait pas la peur. Dessinons-nous une face qui ne sait ni sourire ni gémir, car nous n’espérons pas, nous ne redoutons pas. Nous n’attendons rien, aucun événement, pour habiter notre vie dans le calme. Clairvoyance non. Sagesse pas plus. Seulement une capacité sans mérite, celle de savoir résider dans un présent furtif, et d’y entendre que nous n’y sommes pas seuls.
Car nous ne serons pas seuls, si nous résistons à la logique des événements.
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Ceci en très modeste et très triste hommage à Charlie Hebdo – ne soyons pas les proies de nos peurs, de nos haines.