Dans cette maison,  il y a des endroits sombres, qu’aucune électricité ne vient encore  révéler. Bien sûr on     peut y pénétrer à la lampe torche, découper des morceaux de réel  dans tout ce noir accumulé. On voit alors des dizaines de bouteilles  jonchées, remplies encore, pour certaines, d’un liquide     épais. Ou bien, dans cet autre endroit, au sol, sous les pieds, une  trappe, et sous la trappe aucun escalier, le vide. Mais le faisceau  n’abolit pas l’ombre, et quand on sort, qu’on referme la     porte, le noir envahit tout l’espace derrière, derrière la porte,  mais derrière la tête aussi. On retrouve ces sensations d’enfance, tout  ce peuple du noir prêt à surgir derrière n’importe quelle     porte inhabitée, cave ou placard à chaussures. Et c’est comme s’il  reprenait sa place, le sombre. Sa vraie place impossible à coloniser,  juste à côté, contigue à notre propre monde. Et entre nous     seulement cette mince porte, et l’illusion de pouvoir la maintenir réellement fermée.
Cette mince porte, on la pousse toutes les nuits, pour y explorer quoi? Nous en revenons chaque matin aveugle et sourd, seulement peuplé d’indices, et d’une peur sans origine. Alors, on s’étourdit de travail, de lumière, on civilise avec ardeur les pièces à fenêtres.
Si vous voulez pousser la porte éveillés, il y a bien ça qui peut servir de pied de biche, le texte que j’ai écrit en janvier 2010, chez Publie.net, et qui vient d’être réédité, en version augmentée, en epub, de quelques textes chuchotés : Saphir Antalgos, travaux de terrassement du rêve, (et merci à François Bon pour l’occasion donnée de cette nouvelle version).