C’est moi qui t’ai indiqué l’endroit où te placer. Toi toute claire devant ce fond de pierres taciturnes, pour mieux te faire ressortir, t’ai-je expliqué. Tu as posé ta petite main gantée sur le rocher.
J’ai dit, on ne bouge plus.
Tu n’as plus bougé. Tu as obéi, tu es l’obéissance même, la fraîcheur de l’obéissance qui ne sait pas encore distinguer la volonté des autres de son propre désir. Tu fais tout de bon coeur. Tu es un bon petit coeur affublé et enthousiaste, tiré à quatre épingles.
De toi, de toi comme personne, on ne voit que ton visage rond et radieux, fier d’être aujourd’hui couronné (tu es un peu reine, un peu fée). On voit aussi sortir du blanc tes bras frêles et tes genoux qui surplombent des chaussettes si bien remontées.
De toi comme petite personne, c’est tout ce qu’on voit. Le reste, c’est le rôle qu’on t’a fait endosser, le rôle de la pureté que tu sais très bien tenir, car tu es un bon petit coeur.
Tu obéis, donc, tu ne bouges plus.
Et pourtant.
Quand je regarde la photographie, je vois que tu es déjà en marche, tes pas futurs soulèvent ta robe, et tu es tout sauf immobile.