Temps de travaux. Rien n’est à sa place, les meubles sont entassés, les chaises cul par-dessus tête. Ce n’est pas ce qu’on connaît si bien, trop bien, cette somme changeante d’objets désarrimés, que chaque jour on déplace, on replace. Ce n’est pas cette simple poussière fine et désobligeante du quotidien, qui revient. Ce sont des gravas francs, la joie des déplacements définitifs. Rien n’est à sa place, mais ce n’est pas du désordre.
Les murs ont des saignées. Les ardoises sont à terre : par la claire-voie des charpentes on aperçoit le ciel. Tout est à vif. Alors pour faire comme si on était encore abrités, à la fin des journées de travaux, sur les endroits touchés et non terminés, on met des bâches.
On met des bâches sur tout ce qui se trame, tout ce qui est nu et en attente de sa forme. On met des bâches pour être les seuls à savoir, comment tout est si beau d’être ainsi défiguré, en devenir. (Et la voix de ma fille, dans le jardin de cette maison en travaux, chantonnant pour elle-même le rêve d’un prince et d’une princesse dans Peau d’âne : « Mais qu’allons nous faire de tout ce bonheur, le montrer ou bien le taire? »)